Et c’est vrai. N’ayant nulle part où aller, les clubs de fitness recherchent des outils numériques pour les aider à atteindre leurs adhérents et à rentabiliser leurs efforts. De même, comme le confinement l’impose, les amateurs de fitness se sont tournés vers la vidéo en streaming, le contenu à la demande et le home fitness.
Ces évolutions nous ont amenés à nous demander : l’industrie du fitness sera-t-elle toujours la même ?
En réponse, les mails, les textes, les tweets et les commentaires sur LinkedIn ont afflué. Comme on pouvait s’y attendre, les réactions se sont divisées en deux camps : le home fitness ou en club.
Il y a les adeptes des clubs de fitness :
« J’aime la communauté, l’environnement et l’entraînement. J’ai hâte d’y retourner ».
Et à l’inverse, ceux qui sont convaincus de pratiquer du fitness à la maison :
« Cette application/cet équipement change la donne. Je n’y retournerai jamais ».
Une histoire aux deux extrêmes. L’innovation crée des opportunités au détriment du statu quo. Dans toute industrie, les perturbations divisent les gens en fonction de ceux qui ratent ou saisissent une opportunité.
Parmi les perturbateurs, le rythme et la gravité des changements sont souvent exagérés. À l’inverse, les perturbateurs sont lents ou peu enclins à réagir, comme par exemple, lorsque Flywheel et SoulCycle ont au départ tous les deux refusé les ouvertures de Peloton. Souvent, la réalité a tendance à être plus nuancée, surtout à court terme.
→ Vue d’ensemble : Comme la plupart des choses, l’avenir de la forme physique n’est pas noir ou blanc, il est gris. C’est pourquoi, lorsque l’obligation de rester à la maison sera levée, il y aura un retour à l’exercice physique en club.
Les animateurs
Il faudrait 14 à 21 jours pour prendre une nouvelle habitude. Si c’est vrai, les personnes qui en télétravail pourraient facilement établir un nouveau programme d’entraînement pendant les semaines ou les mois d’arrêt.
Après tout, des facteurs tels que la commodité, le risque couru en fréquentant à nouveau les espaces publics et l’argent investi dans de nouveaux équipements font que rester à la maison s’avère être un choix facile.
De plus, rien de tel que de survivre à une pandémie pour vous inciter à réévaluer vos priorités. Consacrer plus de deux heures à la pratique du fitness (en tenant compte des déplacements, du stationnement, de la douche, etc.) est dérisoire par rapport au fait de passer plus de temps en famille.
Les optimistes
Le passage au numérique des cours de fitness à réaliser à la maison sont pour d’autres, une contrainte plutôt qu’une véritable envie. Une fois la crise sanitaire passée, des gens auront envie de reprendre leurs anciennes habitudes, de retrouver l’énergie qu’ils avaient lors des entraînements en club.
La responsabilité, la motivation et l’instruction en temps réel – caractéristiques de la formation individuelle ou collective – sont difficiles à reproduire virtuellement. Pire encore, l’isolement alimente la solitude et constitue une menace pour la santé mentale et le bien-être général.
Et n’oubliez pas que la remise en forme à domicile n’est pas un phénomène nouveau. Certaines personnes n’ont pas beaucoup d’espace chez eux ou ont un manque d’argent pour investir dans du matériel adapté. D’autres n’ont tout simplement pas le désir ou la volonté de s’entraîner seul.
Les arguments en faveur de la communauté
En plaidant pour Barry’s, Y7 Studio, CrossFit ou en transpirant ensemble, la communauté est placée au centre chez les adeptes du fitness en club. L’attrait viscéral, à la limite de l’irrationnel, est difficile à quantifier ou à articuler. C’est pourquoi il vaut d’autant plus la peine d’essayer.
Le coaching et l’entraînement avec d’autres personnes présentent des avantages par rapport à l’entraînement effectué seul. Mais les résultats ne sont pas le seul facteur de motivation.
Une enquête Nielsen 2014, sur les tendances mondiales en matière de fitness a révélé que 63 % des clients des studios de sport étaient là pour l’aspect communautaire.
→ L’aspect communautaire : L’essor du fitness en club coïncide avec le déclin de la religion, en particulier chez la jeune génération aux Etats-Unis.
Aux Etats-Unis, entre 2003 et 2017, le nombre d’adhésions à des clubs de fitness a augmenté de 121%. Le secteur dans son ensemble a engendré 32 milliards de dollars. Cette tendance à fréquenter les clubs a atteint une proportion très forte chez les jeunes. Ils ont montré une préférence pour le fitness en club, en fréquentant ces lieux à un taux plus élevé que les autres catégories de population.
Au cours d’une période similaire, les jeunes se sont éloignés plus que jamais de la religion célébrée en groupe. Selon un sondage Pew de 2017, lorsqu’on les interroge sur leur appartenance religieuse, 29 % des jeunes s’identifient comme étant « spirituelles, mais pas religieuses », et 37 % des Américains déclarent ne pas être affiliés à une religion (donc athée, agnostique ou « rien de particulier »).
Le fitness comme religion
Ce sentiment est le mieux représenté dans How We Gather, une étude réalisée en 2015 par Angie Thurston et Casper ter Kuile de la Harvard Divinity School.
En faisant des recherches sur l’identité religieuse dans nos sociétés laïques, Thurston et ter Kuile sont tombés sur un fait intéressant : la génération des millénials se tourne vers les cours de fitness pour le rituel, la communauté et une quête de sens.
« Les gens viennent parce qu’ils veulent perdre du poids ou gagner de la force musculaire, mais ils restent pour la communauté… Ce sont vraiment les relations qui les font revenir. » – Casper ter Kuile.
Plus précisément, l’étude a révélé comment des concepts de fitness comme SoulCycle et CrossFit jouent le rôle de la religion célébrée en groupe, en offrant les mêmes principes : communauté, transformation personnelle et sociale, recherche d’un but, créativité et responsabilité.
En fin de compte, les chercheurs ont conclu que la religion n’était pas en train de mourir. Elle change. Et maintenant, on peut dire la même chose de la pratique du fitness.
Regarder vers l’avant
Pendant la période de confinement, attendez-vous à ce que les contenus en streaming et à la demande dominent. De même, le fitness connecté surfe sur cette vague de dynamisme. Cependant, le temps nous dira si cette vague d’inscriptions est liée à une adhésion à long terme ou si elle va au-delà de la forme physique déjà acquise.
En attendant, les fournisseurs de services de remise en forme, notamment les instructeurs, les entraîneurs et les propriétaires, seraient bien avisés d’étudier le rapport How We Gather, y compris l’interview avec le PDG de CrossFit, Greg Glassman (lien ci-dessous). À leur insu, les auteurs ont créé une sorte de guide ludique sur la meilleure façon de satisfaire les adhérents dans un monde de plus en plus numérique.
→ Une solution à court terme : les séances d’entraînement Zoom et Instagram Live (IG) pourraient être la seule source de revenus. Mais à long terme, la vidéo pourrait finir par être un piège. Au lieu d’essayer de rivaliser avec les clubs de fitness du monde entier sur le plan du contenu ou de l’échelle, travaillez les points suivants : l’empathie, la personnalisation et l’interaction humaine.
Rappelez-vous : le changement était inévitable bien avant COVID-19. Le paysage du fitness change, la tendance à l’exercice physique individuel via le numérique n’élimine pas le fitness pratiqué en communauté dans les lieux publics. Mais elle marque la fin du statu quo.
Pour suivre sur les réseaux sociaux Joe Vennare : https://twitter.com/JoeVennare
Co-fondateur du site Fitt Insider : https://fitt.co/
Rapport d’étude How We Gather : https://caspertk.files.wordpress.com/2015/04/how-we-gather.pdf
Interview en anglais – CrossFit as Church ?! – avec le PDG de CrossFit : https://www.youtube.com/watch?v=9oc8ZRKDCyU&feature=youtu.be