Depuis l’essor de l’activité en 2011, de nombreuses structures de CrossFit (on les appelle les boxes) ouvrent chaque jour dans le monde entier. En France, à cette époque, on pouvait les compter sur les doigts d’une main alors qu’actuellement il en existe plus de 600 sur le territoire.
Quelles sont les raisons de cette croissance fulgurante en moins de dix ans ? Quel est le modèle ? Est-ce une bonne idée de sauter le pas et d’ouvrir sa structure ?
Comment CrossFit a révolutionné le sport en salle
Il y a vingt ans, le fitness en salle portait essentiellement sur une pratique très (trop ?) sécuritaire : la plupart des salles proposaient plusieurs ergomètres, des machines guidées et très peu de poids libres. La tendance était même de ne plus avoir d’haltères et de barres dans les salles pour éviter un public trop apparenté au culturisme ou à la force athlétique. Il n’existait pas ou peu de place pour le travail fonctionnel, avec une grande variété d’exercices réalisés à haute intensité.
CrossFit est venu proposer une vraie alternative aux personnes recherchant l’entraînement en groupe, encadré, permettant de sortir de sa zone de confort, dans un environnement très différent des salles de fitness.
En outre, la marque américaine a su développer une communauté à travers ses pratiquants : partage de la souffrance dans l’entraînement, style vestimentaire, langage et codes identitaires, modèle alimentaire, compétition… Tous ces éléments ont permis de développer une culture et une identité propre, parfois même à l’extrême.
Beaucoup de owner de boxes (propriétaire de salle de CrossFit) ont suivi un schéma classique pour monter leur structure : après avoir pratiqué dans une boxe ou ailleurs, le futur owner passe son level 1 (formation CrossFit de base) et demande ensuite son affiliation. C’est-à-dire la possibilité d’ouvrir une structure en utilisant la marque CrossFit. Une fois l’accord obtenu, et les locaux identifiés, il pourra alors proposer les fameux WOD à ses futurs adhérents.
Peu d’équipement, peu de coachs (souvent juste le dirigeant, voire un coach en plus), un local situé dans une zone industrielle reculée (le loyer y est souvent plus qu’abordable), pas de fioriture, confort très limité. En d’autres termes, on maximise essentiellement l’espace d’entraînement, le reste a peu d’importance.
Pour moins de 100 000 €, il est possible de se lancer dans l’aventure alors qu’une salle de fitness de taille moyenne (800-1 000 m2) avec machines guidées et cardio-training peut représenter un investissement 10 fois supérieur.
Sur le papier, ça paraît simple, mais la réalité peut être très différente.
Quelles sont les étapes ?
Avoir des dirigeants/fondateurs passionnés par le CrossFit est essentiel. Les athlètes sentent immédiatement la ferveur du coach, ce qui les pousse eux-mêmes à se dépasser également.
Seulement, ouvrir une boxe est avant tout une activité commerciale, qui se traduit essentiellement par une vente d’un service et, de fait, des abonnements ou de séances d’entraînement.
En ce sens, le dirigeant a donc des obligations et des responsabilités. En voici quelques-unes :
- Comme tout lancement d’activité préalable, il est recommandé d’avoir un business plan.
Le concept, l’offre et son développement, le compte de résultat prévisionnel sur les 3 années, le plan de financement, le plan de trésorerie sont des éléments indispensables que tout établissement de crédit exigera. Il est alors plus que conseillé d’avoir un dossier solide.
- Le choix du local demeure déterminant. Trois éléments indispensables à la réussite : l’endroit, l’endroit et l’endroit ! Or, on voit souvent des emplacements de boxes dont le choix se fait plus par contraintes budgétaires, de superficie et de nuisances sonores (liées aux vibrations des barres au sol notamment). La sélection du local doit non seulement faire l’objet d’une étude minutieuse (étude de marché) mais doit aussi répondre aux obligations légales, à savoir : destination du bien (commerciale, industrielle) et l’accessibilité au public (classification ERP). Beaucoup de structures à ce jour ne sont pas aux normes d’accessibilité et de sécurité, ce qui peut entraîner de lourdes sanctions en cas de contrôle de commission de sécurité, mais aussi d’accidents.
- Faire évoluer le modèle : une structure ne peut pas reposer sur une personne ou deux. Comme je l’ai précisé un peu plus haut, l’histoire commence souvent seul. Le dirigeant ouvre sa propre structure, avec peu de charges salariales puisque les séances de coaching sont dispensées par ses soins. Le temps qu’il passe à encadrer les WOD reste du temps qu’il ne passe pas à développer l’activité commerciale, à travailler le plan de communication, et à développer l’offre de fidélisation et l’évolution du produit. Or, ouvrir une structure demeure avant tout un business qui doit rester lucratif.
Le modèle est-il viable sur du long terme ?
Sans aucun doute ! Les boxes sont venues proposer une vraie alternative aux clubs de fitness traditionnels, notamment pour ceux qui n’auraient jamais poussé la porte d’une salle de sport, ou encore les pratiquants déçus.
Même si beaucoup de salles essayent de se prêter aux jeux des WOD en y installant des espaces de « cross training », l’esprit CrossFit peut difficilement s’y rattacher.
L’avenir laisse entrevoir des structures de plus en plus professionnelles, composées d’une offre sérieuse et différenciante, avec une stratégie de prix correspondant au service reçu.
Toutefois, l’image CrossFit renvoie souvent à une pratique élitiste et communautariste. Pourtant, le CrossFit se veut être le sport du fitness pour tous, à travers des mouvements et disciplines fonctionnels d’une grande variété à haute intensité.
Les boxes devront donc rester attentives à la perception des pratiquants afin que cette dernière soit le plus possible en adéquation avec l’esprit originel.
Ouvrir sa structure est une aventure passionnante. Elle peut sembler tellement accessible et réalisable rapidement qu’elle nécessite d’anticiper la partie cachée de l’iceberg.
Dernier point et non des moindres : il faut analyser les raisons qui poussent à ouvrir son entreprise. Est-ce par passion de l’activité uniquement ? Ou par conviction de pouvoir apporter une offre au service des personnes pratiquantes et non-pratiquantes afin d’améliorer durablement leur niveau de condition physique ?